Témoignages de familles LGBTparentales
Les Enfants d'Arc en Ciel, l'asso ! donne la parole aux familles LGBTparentales
Livret de témoignages "Le cri des coeurs"
« Le cri des cœurs », c’est l’histoire de mamans injustement privées de leurs enfants qui se battent pour les retrouver, et qui souhaitent que leur parole soit portée au-delà de l’association, pour que demain plus aucune mère ne connaisse la douleur qui les habite.
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Un parcours aussi long, aussi cher, ça entame un couple, forcément.
Un parcours aussi long, aussi cher, aussi compliqué, ça entame un couple, forcément. Ça abîme l’estime de soi, la confiance dans le couple, ça use le quotidien et tous les projets. Pendant cinq ans, nous avons mangé chez nous plutôt qu’au restaurant, nous avons limité les vacances, avons limité les sorties aussi. Pour des raisons budgétaires, certes, mais aussi et surtout pour être disponibles chaque mois pour le parcours. Au cas où. Au cas où ça marche, au cas où ça ne marche pas, au cas où on ait besoin de faire des échos, des piqûres, des ponctions, des transferts…
Après cinq ans de parenthèse totale dans notre vie, notre couple n’a pas survécu à ce parcours. Nous nous sommes sépa-rées avant le premier anniversaire de notre fille, laissant planer sur nos têtes l’épée de Damoclès de l’adoption. Nous avions en effet lancé les démarches dès la naissance, mais le Tribunal traînait un peu et nous nous sommes retrouvées dans une situation aberrante où nous devions simuler la pérennité de notre mariage afin de ne pas être dénoncées par des voisins ou des proches. Même la crèche ne savait rien de notre séparation ! Pas évident de se séparer sereinement dans ces conditions, puisque le divorce était suspendu à cette adoption. Au bout de nombreux mois, quand l’adoption a enfin été prononcée, nous avons pu passer à l’étape suivante de nos vies, tournant ainsi la page d’une histoire semée d’embûches.
Aujourd’hui, L. a six ans et elle sait que ses mamans feront toujours tout pour son bien-être, comme nous l’avons fait depuis 2010, puis depuis sa naissance, nous mettant parfois de côté pour contourner les extravagances d’une loi rarement pensée pour nous.
Après un parcours aussi compliqué, nous devrions mériter un peu de calme non ? Et bien suite au divorce, les grands-parents de L. ont décidé de nous poursuivre en justice pour un droit de visite et d’hébergement. La robustesse du couple parental qui succède au couple amoureux sera mise à l’épreuve pour toujours semble-t-il, et les arcanes des frais de justice n’ont plus de secret pour nous !
En savoir + « Un parcours aussi long, aussi cher, ça entame un couple, forcément. »
Le fait que notre aînée soit issue d’un don anonyme a imposé le même traitement pour son petit frère ou sa petite soeur
Nous voici donc parties à Barcelone entre deux confinements, des consultations Skype, un budget conséquent économisé année après année. A notre immense surprise, il ne nous faudra qu’un aller-retour à la clinique puisque la ponction a correctement fonctionné et que l’embryon transféré s’est implanté du premier coup ! Nous n’y croyions pas et c’est ce qui a failli nous mettre dans une situation improbable : à peine arrivées en Espagne, la loi française passait et avec elle ses circonvolutions administratives pour le traitement des situations « entre deux ». Nous n’avions pas encore fait la ponction que nous apprenions qu’il nous était nécessaire de réaliser auprès d’un notaire la reconnaissance conjointe anticipée. Ce papier, qui ne peut être réalisé à distance, indique le souhait du couple à avoir un enfant ensemble. C’est la seule façon de ne pas avoir besoin de passer par l’adoption. Echaudées par l’expérience très pénible de l’adoption de l’aînée, et souhaitant garantir la protection de notre enfant à venir au plus vite, nous avons dû trouver en urgence un notaire, réaliser l’acte au plus vite afin de ne pas se retrouver coincées par la suite.
L’association des Enfants d’Arc en Ciel a été un soutien sans faille dans cette nouvelle épreuve. Nous étions pleines d’hormones, à l’étranger, perdues dans de nouvelles lois que nous ne maîtrisions pas et l’écoute, le réseau mobilisé par l’association nous ont permis de rester (relativement) calmes et d’aller au bout des démarches. Notre fille va naître d’ici quelques mois et nous pourrons aller la déclarer en Mairie sereinement.
Aujourd’hui, je suis heureuse et sereine.
Après la peur, les doutes… je décide enfin d’assumer cet amour et d’être heureuse à 100% et je découvre également très vite tout ce que cela implique.
J’ai débuté cette relation en pleine manifestation du mariage pour tous, découvrir cette haine qui habite certaines personnes était effrayant, incompréhensible et dénué de sens mais ça n’a fait que renforcer mon envie d’assumer cet amour.
Nous nous sommes mariées il y a maintenant 5 ans en France avec tous nos proches. En Août 2018, notre désir d’enfant étant toujours aussi profond, nous entamons alors des démarches de PMA à l’étranger (incroyable de devoir quitter son pays pour pouvoir fonder sa famille !).
Nous nous renseignons en Belgique et nous découvrons avec stupeur qu’un test psychologique est demandé avant même d’entamer toute démarche ! Nous avons refusé catégoriquement, pourquoi nous demander un tel test, comment douter qu’un couple qui entame une PMA qui se veut parfois fastidieuse et longue n’est pas foncièrement prêt à aimer cet enfant ? Nous nous sommes alors orientées en Espagne, la clinique était parfaite, l’équipe médicale s’est tout de suite voulue rassurante et bienveillante et tout ça sous une aura de normalité. Banco nous nous lan-çons… et en décembre de la même année nous avons la joie de découvrir que je suis enceinte, moment incroyable car l’insémination a fonctionné du 1er coup.
En Aout 2019 notre petite fille nait, nous sommes heureuses, tout est parfait.
Notre couple est tellement banal aux yeux de notre famille et amis que nous oublions qu’il ne l’est pas pour tous et c’est cette « charmante » dame au service de la déclaration des naissances de la mairie qui nous le rappelle : « Ah oui vous êtes le mariage pour tous ». Sur le moment j’avoue ne pas avoir compris le sens de cette phrase, et puis lorsqu’elle a ajouté en s’adressant à Ornella « Vous, vous n’êtes personne pour cette enfant, vous n’existez pas » que je me suis pris de plein fouet la haine de cette femme, j’ai eu tellement mal !!!!
Aujourd’hui nous avons fait la déclaration conjointe à postériori chez le notaire qui permet à Ornella d’être reconnue comme parent. Elle pourra enfin voyager seule avec notre fille, prendre une décision d’urgence à l’hôpital en cas de besoin et surtout, si le pire arrivait, nous sommes enfin sûres que personne ne pourra lui enlever la garde. L’administration Française est tellement mal renseignée en ce qui concerne les nouvelles lois que malgré cet acte notarié rien n’est effectif tant que le livret de famille n’est pas à jour et cela fait deux fois qu’on nous renvoie chez nous car personne ne semble savoir gérer cette nouvelle situation.
Je pense souvent à ces femmes et hommes qui n’ont pu vivre leur amour au grand jour, parce que pas la bonne époque ou pas le bon pays… J’ai la chance de pouvoir dire qu’aujourd’hui je suis heureuse et sereine.
La loi ne peut pas tout
Nous avons attendu que la loi de bioéthique soit promulguée pour pouvoir effectuer plus sereinement l’ensemble des démarches pour la PMA. Comme nous avions pris contact avec une clinique à San Sebastian avant cela, nous avons aujourd’hui la chance de pouvoir rapidement être prises en charge là-bas. Car vous l’aurez compris, l’AMP en France ce ne sera pas possible pour nous. Ceci pour 2 raisons: les délais du Cecos aujourd’hui à Lyon sont de 3 ans ; et mes réserves ovariennes ne sont pas suffisantes pour prendre le risque d’attendre. Officiellement nous avons donc fait une demande d’AMP au Cecos de Lyon, mais en parallèle nous allons commencer les inséminations en Espagne.
Nous aurions pu commencer les inséminations au mois de mai, mais certaines contraintes notariales nous retardent. La loi bioéthique ayant établie certaines règles par rapport à la filiation, nous sommes en attente de la rédaction par le notaire de 2 actes qui doivent impérativement être signés avant la première insémination, sous peine de considérablement complexifier les choses une fois l’enfant né. La réalité sur le terrain aujourd’hui c’est que nous sommes confrontées à des notaires réticents, parfois agressifs, et mal informés. Et même s’ils ont une obligation d’instrumenter, notre expérience en la matière reste laborieuse. Les actes à réaliser sont complexes, nécessitent une mise à jour régulière et sont peu rémunérateurs.
Comment pouvions-nous espérer que les échanges soient apaisés ? Concernant le corps médical, c’est une autre histoire. Rien que pour les quelques démarches que nous avons eu à faire ici, nous avons rencontré une bonne moitié de professionnels agissant à l’encontre de la mission de service public qui leur a été confiée. Sans parler du respect du serment d’Hippocrate. Et alors que certains restent discrets quant à leurs opinions, d’autres les affichent de manière totalement décomplexée. A titre d’illustration, nous avons dû consulter un gynécologue spécialisé dans la reproduction. Après m’être entendue dire que le fait de ne pas avoir de relations sexuelles avec un homme allait complexifier les examens et l’insémination, nous avons eu le droit d’assister à une argumentation glaçante nous conseillant de privilégier la voie naturelle ou d’aller en Espagne pour ne pas avoir à encombrer encore plus le Cecos : « situation intenable pour les couples hétérosexuels qui le vivent comme une double peine ». Autre fait marquant lors de mon hystérosalpin-gographie : j’ai été prise en charge par un radiologue qui à l’évidence a perdu tous ses moyens lorsqu’en répondant à une de ses questions je lui ai annoncé que j’étais homosexuelle. Après 20 minutes, on m’a demandé de partir, sans aucun résultat et ce malgré de multiples tentatives très douloureuses. M’ont été reprochés un vagin trop étroit, trop de stress, et une morphologie inadaptée à un tel examen. Le tout pour la modique somme de 170€ aux frais du contribuable ! Cet examen ne pouvant se faire que durant quelques jours du cycle menstruel, une autre clinique lyonnaise a accepté de me recevoir en urgence pour réessayer, et tout s’est bien déroulé. L’ouverture de cette loi est un grand pas pour la communauté LGBT+, mais malheureusement, comme Simone Veil le disait : « La loi ne peut pas tout ». Si nos aînées ont été contraintes de se rendre à l’étranger pour des PMA en toute clandestinité; aujourd’hui nous sommes confrontées à une autre forme de violence, celle d’un pays, notre pays, qui semble avoir légalisé la PMA aux couples de même sexe et aux femmes seules, sans s’être donné les moyens d’accompagner sa mise en application.
La maternité en solo a ça de bien qu’elle ne laisse pas trop de place aux sentiments amers et négatifs.
Le « devenir mère » a guidé chacun de mes pas depuis mon adolescence, il a été présent dans chacun de mes choix. Je voulais devenir mère, partager, transmettre, aimer… Je voulais devenir mère, c’était le sens de ma vie. Mais la vie est parfois coquine en ce qu’elle vous glisse des rêves dans la tête, et vous mets des bâtons dans les jambes pour les réaliser. Parce que pour fonder une famille, il fau(-drai)t « un papa et une maman » et que dans ma famille en construction, il n’y avait alors que la maman.
En quelques mois, j’ai découvert les termes PMA, IAD, stimulation. J’ai compris que j’allais faire un enfant dans l’illégalité. Cette perspective ne me mettait pas à l’aise, générait de la culpabilité. Autour de moi, personne n’avait entendu parler de tels parcours, mon entourage alternait entre soutien, inquiétude, curiosité, inquiétude encore face à cette configuration de « maman solo », face aux questions telles que « comment l’enfant va s’épanouir sans père ». Mon parcours est marqué par la chance : d’abord parce qu’il a été court. Une seule Insémination avec Donneur Anonyme pour mon fils et une seule aussi pour ma fille. Bref, une chance incroyable.
a chance ensuite de toutes les rencontres que j’ai faites en amont, dans le cadre des associations. Les familles homoparentales m’ont soutenue, et à travers le partage de leurs témoignages et leurs expériences, j’ai construit mon chemin. J’étais solo mais jamais je n’ai senti de mise à l’écart de leur part. J’ai une profonde gratitude envers elles.
Et donc je suis partie en Espagne, je suis revenue avec une « graine à bébé » qui a bien germé. Je suis devenue maman, mon fils n’a pas fait ses nuits mais il a fait ses dents, et à chacun de ses réveils ou de ses bobos, il n’y avait que moi pour gérer. C’est fatigant. Beaucoup. Et puis parfois, dans des moments de vague à l’âme, j’aurais voulu partager avec un co-parent, les petits bonheurs et les acquisitions du quotidien. Mais j’étais heureuse. Mon fils grandissait bien. Alors quand il a eu un an, j’ai décidé de compléter notre famille. Quelques mois plus tard, c’est une petite soeur qui a intégré notre foyer. Et je suis encore plus fatiguée, mais encore plus heureuse aussi.
Je me réjouis des avan-cées législatives, bien sûr. Mais les débats sont venus raviver des blessures, quand les « mères célibataires » ont été pointées du doigts comme étant plus/trop à risque de faire souffrir leurs enfants par les conditions de vie qu’elles leur offriraient. J’ai l’impression qu’on m’attend au tournant du coup. Mais la maternité en solo a ça de bien qu’elle ne laisse pas trop de places aux sentiments amers et négatifs. Elle vous embarque dans son tumulte des préparatifs pour l’école, des anniversaires, des disputes, des rendez vous à caser, des rires, des doutes, des craintes, des câlins, et des rêves, encore…
J’existe enfin !
En 2012, quand nous nous sommes séparées, la mère biologique de mon fils et moi, le « mariage pour tous » n’existait pas encore. L’adoption n’était pas possible car nous n’étions pas mariées. Nous avons instauré une garde alternée à l’amiable, elle perdure aujourd’hui. Je n’étais pas sur son acte de naissance, je n’existais pas.
En 2017 une lueur d’espoir avec la « possession d’état ». J’ai fait un dossier, joint des témoignages, envoyé le tout à un juge. Il a souhaité m’entendre ainsi que plusieurs personnes. Il a établi, à la suite des audiences, la filiation. J’étais enfin la mère de mon fils… mais la transcription sur son acte de naissance n’a jamais eu lieu… retour à la case départ. Je n’étais toujours pas sur son acte de naissance, je n’existais pas.
Août 2021 : une nouvelle lueur d’espoir avec la modification de la filiation et la « reconnaissance conjointe à posteriori » . A et moi, nous avons retourné la maison, pour retrouver les papiers prouvant la PMA en Belgique. Après 2 déménagements, ils n’ont pas été faciles à retrouver, mais c’était l’histoire de mon fils, je savais que je les avais gardés.
Septembre 2021 : notaire trouvé, plus rien ne pouvait m’empêcher de devenir la mère de mon fils !
Après 10 ans de garde alternée, de partage de frais, de promesses… la femme de la mère biologique de A a fait une demande d’adoption de mon fils, dans mon dos, sans me citer. Le procureur a donné un avis favorable… le monde s’écroule. Je n’étais pas sur son acte de naissance, je n’existais pas.
Fin 2021 : le juge rejette la « demande d’adoption », et la « reconnaissance conjointe à posteriori » est signée chez le notaire.
Début 2022 mon nom est sur son acte de naissance, j’existe enfin !
Je t’aime, mon fils.
Nous ne cherchions effectivement pas un papa.
La PMA était interdite en France et nous n’avions pas envie de traverser le pays (vers l’est ou vers le sud) pour faire une insémination. Nous avions dans l’idée que tout lâcher le jour de l’ovulation pour faire une dizaine d’heures de voiture tous les mois, allait être très compliqué. En même temps ce côté médical et encadré nous rassurait. Après plusieurs mois de réflexion, nous nous sommes alors tournées vers une banque de sperme danoise. L’avantage était qu’elle faisait des livraisons à domicile et que nous pouvions choisir d’avoir un donneur connu (et même d’accord pour rencontrer l’enfant si c’était son choix). Nous avions trouvé un médecin qui était d’accord pour réaliser l’insémination (alors qu’il risquait sa carrière en le faisant). Après quelques essais et des milliers d’euros dépensés (la pipette de 0,5 ml, le transport dans un contenant avec de l’azote liquide et la livraison à domicile coûtaient environ 1000€), nous avons abandonné car nos finances ne nous le permettaient plus. Le désarroi lorsque l’essai ne s’avérait pas concluant devenait également pesant. Une pause s’est alors imposée.
Nous avons à nouveau réfléchi et nous nous sommes mises en quête d’un donneur dans notre entourage. Le plus important pour nous était qu’il renonce à ses droits parentaux. Le projet était que ce bébé ait deux mamans comme représentantes légales. Le premier homme à qui nous avons demandé, avait du mal avec cette idée. Renoncer à la filiation, à donner son patronyme, son héritage, son mot à dire dans l’éducation, lui paraissait trop dur. C’est une chose que nous avons parfaitement comprise et nous avons donc renoncé. Nous avons demandé à un deuxième homme qui lui, avait déjà trois enfants d’une union précédente et n’en voulait pas d’autre. C’était la réponse que nous voulions entendre ! Nous ne cherchions effectivement pas un papa. Après plusieurs mois de discussions et une journée passée avec les Enfants d’Arc en Ciel, à côté de notre domicile, un accord a été trouvé. Le donneur (en couple avec un homme) a fait toutes les démarches médicales pour s’assurer qu’il n’avait aucun souci de santé. Nous avons également consulté un médecin afin d’obtenir de précieux conseils sur la marche à suivre pour effectuer l’insémination artisanale. N’habitant pas très loin les uns des autres, le donneur faisait son don chez lui et nous allions le chercher avant de revenir à la maison et de procéder à l’insémination toutes les deux. Nous avons essayé pendant quatre mois et lorsque nous avions tous décidé de faire une pause, la dernière insémination a fonctionné. Nous avons créé un groupe de discussions afin de s’informer en temps réel des différents événements liés à la grossesse. La grossesse s’est très bien passée. L’accouchement s’est vécu à deux, mais le donneur et son conjoint sont venus voir notre fils le jour de sa naissance (en octobre 2019). Ils sont aujourd’hui ses deux parrains et bien présents dans sa vie mais nous sommes désormais sans crainte car nous sommes reconnues aux yeux de la loi comme ses deux mamans (grâce à l’adoption plénière de l’enfant du conjoint). Il porte d’ailleurs nos deux noms.
En savoir + « Nous ne cherchions effectivement pas un papa. »
Le dossier faisait une cinquantaine de pages…
Nous avons donc contacté le service juridique de l’association des Enfants d’Arc-en-ciel afin d’être conseillées sur la façon de constituer notre dossier. Nous avions décidé de ne pas prendre d’avocat. Nous nous étions dit que nous en prendrions un si la justice refusait notre demande.
Nous nous sommes rendues au palais de justice pour retirer un dossier. Une des pièces obligatoires était l’acte de mariage. Nous nous sommes donc mariées en septembre 2019. Nous sommes ensuite allées chez le notaire afin d’obtenir un formulaire intitulé « consentement à l’adoption plénière de l’enfant du conjoint ». Nous avons dû attendre six mois afin de l’obtenir (et même un peu plus à cause des confinements !) car nous devions justifier de six mois de vie commune avec notre enfant (obtenu en juin 2020). Nous avons une famille recomposée et donc déjà de grands enfants, qui ont dû chacun donner leur accord pour cette démarche. Heureusement qu’ils étaient d’accord. Que se serait-il passé si cela n’avait pas été le cas ? Nous avons fait faire des témoignages à nos proches afin qu’ils confirment que notre fils était entre de bonnes mains ! Leurs témoignages étaient bouleversants et plein d’amour, mais nous étions gênées de leur demander un tel écrit. Nous nous étions d’ailleurs refusées à le demander à nos amis ou nos collègues comme cela était conseillé.
Nous avons également fourni des photos qui montraient que sa maman était présente à l’accouchement, lui donnait le biberon, le bain, etc et puis des actes de naissances, des pièces d’identité, des attestations sur l’honneur, le contrat de la crèche, le quotient familial de la CAF (qui elle, nous considérait comme membres d’une seule et même famille !). Le dossier faisait une cinquantaine de pages…
Les démarches pour l’adoption étaient lancées, notre fils était né et nous avons voulu lui ouvrir un compte en banque. Sa maman « sociale » a fait les démarches et fourni toutes les pièces nécessaires. Au moment de la signature finale, le directeur de l’agence a mis son veto en indiquant que sa maman « sociale » n’était pas sa représentante légale. C’était la première fois que nous étions confrontées à la nécessité concrète d’obtenir cette adoption plénière. Cela a renforcé notre sentiment d’injustice et notre peur qu’il « arrive quelque chose avant qu’elle soit prononcée.
Nous avons déposé le dossier en novembre 2020. En février nous avons reçu un courrier indiquant qu’il manquait quand même quelques documents… Puis la délivrance est arrivée en avril 2021. Il fallait encore attendre quinze jours que le délai de rétractation soit passé, mais c’était fait ! Le jugement a été transcrit sur les registres de l’état civil en juillet 2021. Que ce fut long et fastidieux…
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Ma vie de maman aujourd’hui, c’est dans les tribunaux et les commissariats que ça se passe.
Ma vie de maman, elle commence en rencontrant celle qui allait devenir mon épouse puis la maman biologique de notre enfant, celle dont je suis tombée amoureuse et avec qui j’ai ressenti pour la lère fois cette envie de « famille », cette envie d’être ensemble, de transmettre, d’éduquer, d’accompagner, d’aider… C’est donc de façon « classique » que l’histoire démarre : une histoire d’amour entre 2 personnes, et l’envie d’avoir des enfants, une famille, NOTRE famille.
Ma compagne va devenir mon épouse et nous concrétisons notre projet « bébé ». Notre fille naît dans l’amour, elle sera portée par mon épouse, accompagnée par mes soins. Sa naissance est indéniablement le plus beau jour de ma vie. Comment avons-nous réussi à créer un petit être aussi parfait ? Les larmes que je ne peux retenir coulent sans contrôle, la venue de notre fille est magique et elle est magnifique. Les tout premiers instants partagés avec elle sont exceptionnels : elle est dans mes bras, on se regarde, je lui souris, elle m’interroge du regard, je l’admire, scrute chacun des détails de son corps et de ses gestes… et puis vient notre peau à peau. Elle est contre moi, elle s’est endormie. Je sens sa respiration et son odeur et m’en imprègne autant que possible. La Terre s’est arrêtée de tourner pour moi.
Nous sommes rentrées à la maison et j’ai pu découvrir les joies, et les difficultés, de cette nouvelle vie… Lorsque notre fille a eu 20 mois, le bonheur a viré au cauchemar : la maman biologique s’est déclarée seule maman de notre fille, a refusé l’adoption puis tout contact entre notre fille et moi. Ma femme m’a donc quittée et m’a enlevé notre fille, sans comprendre ce qui a motivé ce comportement. Heurtée de plein fouet par la douleur, j’ai saisi la Justice, pour expliquer la situation et espérer retrouver notre fille, qui m’appelait « Maman ».
Il est difficile d’exprimer la douleur que l’on ressent de ce manque. Les personnes auprès desquelles je me suis le plus confiée sont celles qui ont perdu un être cher, on partage alors une douleur commune, du réconfort, et des anecdotes : se mettre à pleurer d’un coup parce qu’on a entendu une chanson, senti une odeur ou vu un enfant dans la rue… devoir refaire son maquillage après avoir reçu un coup de téléphone annonçant un report d’audience… tenter de garder le sourire dans les moments « conviviaux » alors qu’on a juste envie de fuir et sortir ce qui fait tant mal.
Ma vie de maman aujourd’hui, c’est dans les tribunaux et les commissariats que ça se passe plus de 3 ans de procédures, des victoires à tous niveaux de juridictions, des plaintes déposées mais une maman biologique qui refuse toujours l’évidence et qui refuse d’exécuter les décisions de justice.
Les contacts avec ma fille sont totalement absents. L’espoir de la retrouver naît à chaque contact avec mon avocate. La loi a bien évolué depuis le début des procédures, protégeant ainsi les autres mamans, et les autres enfants, mais ces lois ne règlent pas notre situation. Ma fille a maintenant 4 ans. C’est une vie de maman qui démarre comme beaucoup d’autres mais qui se poursuit avec son lot d’obstacles. Ils sont évacués un par un. Mais combien de temps encore va-t-il falloir se battre pour pouvoir enfin se retrouver ?
Quand les adoptions ont été accordées, j’avais envie de le crier sur tous les toits.
Pour la constitution « administrative » du dossier, ce n’est pas croyable le nombre de documents qu’il faut fournir pour justifier que je suis bien présente au domicile et que je participe à l’éducation de mes enfants ! Nous avons également terminé le recueil des attestations qui nous sont demandées par le tribunal pour prouver, je cite, qu’il existe « un lien affectif entre l’adoptant et l’adopté ». Autant vous dire que cela n’a pas été simple de dire à nos familles, nos amis que nous avions besoin d’attestations pour prouver tout cela. Nous avons eu de belles surprises qui m’ont mises les larmes aux yeux. Cela est venu partiellement compenser la colère et l’humiliation que j’ai ressentie de demander à mes proches d’attester que j’aime mes enfants !
Nous avons aussi demandé aux professionnels qui côtoient nos enfants (crèche, pédiatre…), à mon directeur… et chaque fois la réponse fut la même, mais comment ça, ce n’est pas automatique avec le mariage ? Et là on se demande pourquoi on a supporté tant de mois de débat et de battage médiatique pour qu’au final les gens n’aient en fait rien compris !
Maintenant, il nous reste à écrire la requête pour le juge et à trouver les bons mots pour lui expliquer pourquoi je souhaiterais qu’il m’autorise à adopter mes propres enfants ! Bien sûr il va falloir que je ravale ma colère et que je courbe le dos pour rester correcte, ne froisser personne et que toutes ces procédures se terminent enfin. Qu’enfin notre famille soit tranquille et surtout protégée.
Suite au dépôt du dossier au tribunal, l’enquête de police a eu lieu : audition au commissariat et visite au domicile. L’audition s’est bien passée, c’était le même policier que pour l’enquête de la Délégation d’Autorité Parentale et il a repris le procès-verbal d’audition précédent donc il m’a simplement demandé d’actualiser les éléments et de lui redire un certain nombre de choses qui était déjà dans le dossier : non, nous ne sommes pas séparées ou en instance de divorce, non je n’ai pas d’autres enfants issus d’une union précédente.
Puis il m’a demandé de décrire mon quotidien avec les enfants et de lui expliquer pourquoi je demandais l’adoption. C’est toujours une grande question ça ! Pourquoi ? Parce que ce sont mes enfants ! Après ça, ils sont venus à la maison pour faire le plan du logement.
Quand les adoptions ont été accordées, j’avais envie de le crier sur tous les toits… et en même temps le sentiment que personne ne pouvait comprendre (à part les familles dans notre situation) à quel point j’étais soulagée et heureuse que ma famille soit enfin en sécurité.
En savoir + « Quand les adoptions ont été accordées, j’avais envie de le crier sur tous les toits. »
Je vais bien.
Ma situation familiale m’a bien sûr fait me poser de nombreuses questions : pourquoi mes parents sont-ils différents ? C’est quoi avoir un papa ? Qui était le donneur belge qui a permis ma conception, et quelles étaient ses motivations ? Mais j’ai aussi beaucoup de certitudes, comme le fait que j’ai deux parents qui m’ont désirée, qui m’aiment et qui me soutiennent. Je pense qu’il est important de dire que pendant longtemps, je n’ai pas osé parler de mes parents à mes amis, par peur sûrement d’être rejetée, de ne pas être comprise…
Même si jusqu’au débat sur le mariage pour tous je n’avais jamais été directement confrontée à l’homophobie, la société dans laquelle je vivais me faisait implicitement comprendre que ma famille ne rentrait pas dans les cases. Je me souviens de l’angoisse à chaque rentrée scolaire, quand chaque professeur nous faisait remplir une petite fiche d’informations sur laquelle il y avait écrit : « profession du père », « profession de la mère ». Je rayais alors timidement le mot « père » pour le remplacer par « deuxième parent », tout en cachant ma feuille des regards indiscrets de mes voisins de classe. Et cela me posait alors un autre problème : celui du vocabulaire.
Mes parents ont fait le choix ne pas considérer que j’ai deux mamans, mais plutôt une maman, ma mère biologique, et un « Kiki », petit nom d’amour donné à celle que j’appelle mon deuxième parent. « Kiki » ne signifie rien pour quelqu’un d’étranger à ma famille et il n’y a pas de mot dans la langue française qui puisse me permettre de désigner ce deuxième parent, ce parent social comme on dit parfois, et d’être comprise de tous. Et puis il y a cette absence de reconnaissance officielle de l’Etat français, qui préfère nier ce qui existe, quitte à créer une source de souffrance et de confusion pour les familles homoparentales, pour ma famille.
Une dernière chose enfin : j’ai été très choquée par tout ce que j’ai entendu pendant le fameux débat sur le mariage pour tous, des propos homophobes tenus en toute impunité dans la rue et relayés par les journaux, aux soi-disant experts parlant de la souffrance des enfants issus de couples homosexuels, et donc en nos noms, sans même prendre la peine de nous consulter. J’ai vécu ces quelques mois comme un harcèlement permanent, tout cela pour une loi qui est certes une avancée, mais qui est loin de donner aux homosexuels français les droits qu’ils devraient avoir.
Mais cette expérience m’a aussi appris à prendre de la distance, à cesser d’essayer de me justifier. Et alors que je parle plus facilement de mes parents autour de moi, je me rends compte que ma génération est plus ouverte d’esprit que la précédente, et que les mentalités évolueront simplement avec le temps. J’arrive à une période de ma vie où je suis plus indépendante, où je connais mes premières expériences de jeune adulte. Je me détache progressivement de mes parents, je me rends compte de leurs imperfections, de leurs erreurs, mais je comprends aussi qu’elles m’ont donné bien plus que l’essentiel, et que pour le simple fait de nous concevoir, moi et ma soeur, elles ont dû affronter un véritable parcours du combattant.
Alors oui, je vais bien, et je suis fière, moi, enfant d’arc-en-ciel.
S’il y avait eu une loi, la réalité aurait été toute autre (…)
Deux femmes qui s’aiment, un enfant en commun et de belles années.
Comme toute les mamans sociales, j’ai coupé le cordon, j’ai donné le premier biberon, j’ai veillé des nuits entières mon enfant contre mon coeur, j’ai essuyé les premières larmes, naturellement… parce que c’est ma fille tout simplement.
Mais les couples se séparent parfois et l’absence de lois provoque les pires drames.
Car à ce jour, la réalité d’une maman sociale c’est d’avoir été séparée de sa fille pendant des semaines, c’est de ne plus pouvoir l’amener à l’école du jour au lendemain, c’est d’accepter tous les chantages pour pouvoir profiter de son enfant, c’est de vivre dans la crainte constante que l’autre vous la retire du jour au lendemain, c’est de faire le deuil d’être une vraie maman, de partager son quotidien, ses nuits, ses rencontres, ses vacances…
C’est de ne pas même pouvoir avoir sa première photo de classe… détail insignifiant peut être, mais tellement parlant.
La réalité à ce jour c’est n’être qu’une tierce personne au regard de la loi, c’est peut être commencer un procès durant lequel je ne verrai plus ma fille pendant des mois, c’est devoir réunir les preuves de l’évidence, devoir prouver que je me suis occupée de ma fille pendant des années, que j’étais présente de la maternité à ce jour, c’est trouver des attestations quand toutes les portes se ferment.
C’est espérer encore, perdre espoir souvent, aimer son enfant toujours…
Parce que s’il y avait eu une loi, la réalité aurait été toute autre et qu’il ne me faudrait pas me battre contre le système français pour pourvoir simplement exercer mon droit de mère.
En savoir + « S’il y avait eu une loi, la réalité aurait été toute autre (…) »
Exposition "Les familles LGBTparentales au quotidien"
Les Enfants d’Arc en ciel – L’asso vous propose une exposition de photos et de témoignages de familles LGBTparentales, recueillis ces dernières années, pour vous faire partager leurs parcours, leurs combats mais aussi leurs bonheurs de tous les jours.
Cette exposition a été construite à partir des témoignages reçus par l’association ainsi qu’avec les photos et dessins fournis par les adhérent.e.s.
Elle est composée de 37 panneaux rigides de 60/80. Elle a été présentée pour la première fois en 2015 lors du Printemps des Assoces, et a été réactualisée en 2022 suite à l’ouverture de la PMA pour les femmes seules et les couples de femme en France. En 2022, une frise reprenant les grandes étapes de l’évolution des lois a été ajoutée. Vous pouvez la consulter en cliquant ici.
Elle peut être mise à disposition par l’association pour des projets culturels ou militants partout en France. La mise à disposition est gratuite, les frais d’expédition (aller/retour s’élèvent à 100€).